Foire aux questions
Dans quelles conditions sont élevés les animaux destinés à la consommation au Québec?
La vaste majorité des animaux destinés à la consommation au Québec sont élevés dans des conditions d’élevage industriel (ou « intensif »), c’est-à-dire en faisant appel à des environnements de production et à des pratiques qui visent à maximiser la production de viande, d’œufs ou de lait, tout en réduisant les coûts au maximum.
Ce mode d’élevage se caractérise par l’utilisation d’espaces réduits, dans des bâtiments fermés, pour loger une grande densité d’animaux. Cela implique le confinement des animaux dans des espaces très étroits, les privant ainsi de la possibilité de se mouvoir confortablement, d’exprimer leurs comportements naturels et d’interagir de manière normale avec leurs semblables. C’est le cas notamment pour les poules pondeuses élevées en cage, les truies confinées dans des cages de gestation et les vaches laitières en stabulation entravée.
N’existe-t-il pas une loi sur le bien-être animal au Québec?
En effet, depuis 2015, dans le cadre de l’adoption de la Loi visant l’amélioration de la situation juridique de l’animal, une nouvelle disposition a été ajoutée au Code civil du Québec reconnaissant que les animaux ne sont pas des biens, mais plutôt des êtres sensibles et une nouvelle loi portant exclusivement sur le bien-être animal, la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal, a été adoptée. Cependant, les animaux d’élevage sont exclus des principales protections de cette loi.
À l’occasion des changements législatifs de 2015, le ministre de l’Agriculture de l’époque avait également promis un encadrement réglementaire du bien-être des animaux d’élevage. Mais 8 ans plus tard, aucun règlement relatif aux animaux d’élevage n’a encore été promulgué.
Pourquoi dit-on que les animaux d’élevage sont exclus des principales protections de la loi?
L’article 7 de la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal exclut tous les animaux exploités à des fins agricoles de ses principales protections, soit celles prévues aux articles 5 (obligation du propriétaire ou gardien d’un animal de lui fournir eau, nourriture, abri, soins, etc.) et 6 (interdiction pour quiconque de causer de la détresse à un animal), pourvu qu’ils soient traités conformément aux « règles généralement reconnues » de l’industrie. Or, ces « règles » ne sont pas définies dans la Loi, si bien que du moment qu’une partie importante de l’industrie emploie une certaine pratique, celle-ci est considérée comme étant conforme aux « règles généralement reconnues ». C’est donc l’industrie elle-même qui détermine quelles pratiques bénéficient d’une exemption à la loi et sont donc légales.
Voilà pourquoi il est tout à fait légal, et même pratique courante, de castrer un porcelet sans anesthésie, alors que le même geste posé à l’égard d’un chien ou d’un chat serait passible d’une condamnation et même d’une peine d’emprisonnement.
L’exemption de l’article 7 de la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal excluant tous les animaux exploités à des fins agricoles de ses principales protections permet essentiellement au secteur privé de s’autoréglementer et représente donc une abdication de responsabilité publique de la part du gouvernement.
Que sont les Codes de pratiques relatifs à l’élevage? Ce ne sont pas des règlements?
Dans l’industrie agroalimentaire, la plupart des secteurs qui utilisent des animaux participent déjà, par le biais du Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage (CNSAE), à un processus de développement et de révision de codes de pratiques pour les soins et la manipulation des animaux d’élevage. Ces codes constituent des lignes directrices élaborées à l’échelle nationale et représentent les pratiques recommandées en matière de soins aux animaux. Ils n’ont toutefois pas, en soi, force de loi au Québec et l’adhésion à ces codes se fait sur une base volontaire.
Par ailleurs, l’industrie fait partie intégrante du processus de développement des codes et est même représentée de manière majoritaire au sein des comités de développement de ceux-ci.
Certains secteurs affirment imposer une pleine adhésion aux codes de pratiques à leurs producteurs. Même si c’est le cas, le fait que le respect de certaines normes soit exigé par l’industrie elle-même, plutôt que par le gouvernement, soulève plusieurs problèmes. Premièrement, le système mis en place pour assurer le respect des codes implique généralement une vérification effectuée par l’industrie elle-même, plutôt que par un tiers indépendant. Deuxièmement, les sanctions appliquées en cas de non-conformité sont également déterminées par l’industrie elle-même. Enfin, puisqu’il s’agit d’un système de surveillance privé, celui-ci n’est pas soumis aux mêmes exigences de transparence et d’imputabilité qu’un système de surveillance public.
Les provinces de Terre-Neuve-et-Labrador et l’Île-du-Prince-Édouard ont rendu obligatoire l’adhésion aux codes de pratiques du CNSAE.
Est-ce que certains règlements s’appliquent quand même aux animaux d’élevage?
Alors qu’aucun règlement n’encadre le traitement des animaux pendant toute la durée de leur vie dans les exploitations agricoles, leur transport et leur abattage, eux, sont gouvernés par certaines lois fédérales et provinciales.
Le transport des animaux élevés pour la consommation est encadré par le Règlement sur la santé des animaux au niveau fédéral et la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal au niveau provincial. Leur abattage est encadré par le Règlement sur la salubrité des aliments au Canada au niveau fédéral et le Règlement sur les aliments au niveau provincial.
Où se situe le Québec au chapitre des meilleures pratiques internationales?
Ailleurs dans le monde, notamment en Europe, des lois ou règlements ont été adoptés pour imposer des normes de soins obligatoires pour toutes les espèces animales, y compris les animaux utilisés à des fins agricoles. En Suisse, par exemple, une réglementation détaillée pour chaque espèce et chaque type d’utilisation a été développée.
Plusieurs pratiques qui compromettent gravement le bien-être des animaux d’élevage et qui ont été interdites ailleurs dans le monde – précisément pour cette raison –, sont encore très répandues au Québec. Par exemple, le confinement des animaux dans des espaces très étroits, les privant ainsi de la possibilité de se mouvoir, d’exprimer leurs comportements naturels et d’interagir de manière normale avec leurs semblables, est pratique courante dans la plupart des secteurs agroalimentaires québécois. C’est notamment le cas pour les poules pondeuses élevées en batterie, les truies confinées dans des stalles de gestation et de mise bas et les vaches laitières en stabulation entravée.
Un autre type de pratique, elle aussi encore courante au Québec alors qu’interdite ailleurs, est la mutilation systématique sans contrôle adéquat de la douleur. La castration des veaux et des agneaux, la coupe de la queue des agneaux et l’amputation partielle du bec des poules pondeuses se pratiquent toutes couramment sans aucune analgésie ni anesthésie au Québec. La castration des porcelets, quant à elle, se pratique sans anesthésie. L’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) est pourtant d’avis que plusieurs de ces pratiques constituent des interventions douloureuses pour lesquelles l’anesthésie et l’analgésie sont toutes deux requises.
Qu’en est-il des appellations « en liberté » et autres?
La SPCA de Montréal croit que l’industrie agricole devrait être tenue de divulguer, par le biais de l’étiquetage obligatoire, la méthode d’élevage utilisée pour produire la viande, les œufs et le lait. Elle a d’ailleurs soumis des commentaires à cet effet à l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) en 2019, lors d’une consultation tenue dans le cadre de l’initiative de modernisation de l’étiquetage des aliments.
Non seulement aucun étiquetage obligatoire n’est requis pour les produits d’origine animale, mais les mentions relatives au bien-être animal sur les produits alimentaires ne sont pas règlementées et donc invérifiables pour les consommateur.trice.s.
La mention « œufs de poule en liberté », par exemple, qui est fréquemment utilisée sur les emballages d’œufs, n’est pas réglementée, si bien que son utilisation ne correspond pas à des normes précises et n’est pas vérifiée. De plus, ce terme est trompeur en raison du fait que les poules pondeuses qui produisent les « œufs de poules en liberté » vivent généralement en permanence à l’intérieur de bâtiments et sont entassées en densité quasiment aussi élevée que dans les productions en cage.
Les éleveurs du Québec n’ont-ils pas le bien-être des animaux à cœur?
Le problème ne relève évidemment pas des producteurs en tant qu’individus, mais bien du système dans lequel ils s’inscrivent. Un encadrement réglementaire comportant des normes prescrites et obligatoires ne pourra qu’avantager les productions déjà soucieuses du bien-être animal et assurera que toutes les autres adoptent les meilleures pratiques de façon uniforme et réglementée.
Est-ce que les vaches, les poules et les cochons ressentent la douleur au même titre que nos animaux de compagnie?
Il existe un vaste consensus scientifique à l’effet que ces animaux sont tout aussi capables de ressentir de la douleur et de la souffrance que nos chiens, chats et autres animaux de compagnie. Plus la recherche progresse, plus la science nous indique que de nombreux animaux ont des capacités cognitives et émotionnelles bien plus complexes qu’initialement soupçonnées – et cela vaut autant pour les chiens et les chats que pour les vaches, les cochons, les poules et les autres mammifères et oiseaux élevés pour notre consommation. Il est donc nécessaire de tenir compte des intérêts et des besoins de tous les animaux dans notre façon de les traiter.
Bien que les animaux élevés pour la consommation soient des êtres sensibles, ayant des capacités cognitives et émotionnelles complexes, en étant systématiquement exclus des principales protections offertes par la loi, de nombreuses pratiques qui causent de la souffrance demeurent permises à leur égard, alors que celles-ci seraient criminelles si elles étaient utilisées chez les chiens ou les chats, par exemple.
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